Sortir un morceau contenant l’enregistrement du bruit d’un polisseur à chaussures, ça n’est pas toujours passé auprès du grand public. La révolution industrielle nous a paraît-il conféré une plus vaste appréciation des sons complexes et en matière de styles musicaux étranges, le « Bruitisme » fait partie du podium.
« L’Arte dei Rumori » (L’Art des Bruits)
Le style musical apparaît au début du XXème siècle en même temps que le « Futurisme ». Ce mouvement littéraire et artistique exalte le monde moderne et les nouvelles dynamiques qu’il inspire, en particulier à travers la peinture.
Les pionniers du Bruitisme sont généralement d’étranges chasseurs-cueilleurs de sons irritants et assez désagréables. Harmonies synthétiques, industrielles et autres sonorités plus ou moins naturelles en sont les caractéristiques. Parmi eux le français Pierre Henry, auteur de Psyché Rock, sortie en 1969, devenue plus tard bande-son du générique du dessin-animé Futurama depuis sa création en 1999.
Le bruyant: plutôt « Non-musique » ou « Tout Est Magnifique »?
Peu reconnu et relativement sectaire, le Bruitisme est particulièrement difficile à contempler et son principal apport reste philosophique. Jean-Marc Vivenza réalise notamment en 1985 les « Servomécanismes ». Au programme, des sons froids, cinglants, et surtout complètement insolites qui mettent en lumière un « être » de la technique.
Dans le même registre, on trouve la musique industrielle et dark folk de Boyd Rice et son projet « NON » dont les concerts invitent le spectateur à réagir : se soumettre ou se libérer. Ses influences d’extrême-droite, nihiliste et sataniste laissent perplexes. En effet, le haut dignitaire de l’Eglise de Satan inspirera même Marylin Manson…
Evidemment, tout dans le Bruitisme ne se résume pas à d’aussi glauques compositions car parmi les grandes familles musicales de ce mouvement, l’électroacoustique répond aussi présent. Fondateur du collectif « Pain surprises », Jacques fascine par son style minimaliste et ses performances live où on peut l’admirer manipuler puis enregistrer les bruits de pulvérisateur, cloche ou petit canard. Le monde bruyant a définitivement d’innombrables facettes à révéler, et parce qu’il est vraiment perché, ça nous fera toujours autant d’effet.